Que faut-il croire? Croyances complotistes et la pandémie

Ce blogue, premier d’une série de deux, a pour objectif de décrire le profil des personnes à fortes croyances complotistes, ayant répondu à notre enquête en janvier 2021. Il s’agit d’une étape préalable à l’analyse du lien entre croyances complotistes et bien-être, qui fera l’objet du deuxième billet de blog portant sur les théories du complot.

Les croyances complotistes : un contiuum de la méfiance

Qu’est-ce-que les théories du complot ?

Les théories du complot sont des fausses croyances qui attribuent la cause d’événements importants ou graves aux intentions souvent malveillantes d’individus ou de groupes puissants qui travailleraient ensemble en secret.

Il existe donc des croyances complotistes spécifiques, mais on peut aussi parler de “mentalité complotiste”, qui constitue la tendance générale à souscrire à ce genre de croyances, peu importe le sujet.

Les croyances complotistes sont donc liées au niveau de méfiance envers les gouvernements, les organismes publics et les compagnies privées. On se situe tous et toutes d’une manière ou d’une autre sur le continuum de la méfiance. Il est sain de remettre en question les décisions et les actions des institutions qui ont un impact sur nos vies. Toutefois, chez certaines personnes, ce niveau de doute se généralise à l’égard du fonctionnement de la société dans son ensemble, risquant de miner la cohésion sociale et d’engendrer de la détresse. Il convient donc d’analyser cette vision du monde sans porter de jugement.

Profil des personnes à fortes croyances complotistes

Statut socioéconomique

Au total, 13 % des répondants présentent un niveau plus élevé de croyances complotistes, mesurées avec des questionnaires spécifiques. On remarque peu de différences dans la proportion de personnes à fortes croyances complotistes entre les hommes (14 %) et les femmes (12 %), ni entre les différentes catégories d’âge.

En termes de niveau de scolarité, on observe une différence marquée entre les personnes détenant un diplôme universitaire et En termes de niveau de scolarité, on observe une différence marquée entre les personnes détenant un diplôme universitaire et celles qui n’en ont pas. Alors que 6 % des personnes avec un diplôme universitaire affichent une mentalité complotiste, cette proportion grimpe respectivement à 26 % et 22 % chez les diplômés de niveau collégial et les personnes avec une formation primaire ou secondaire. Cette différence pourrait s’expliquer par des habitudes différentes de consommation de l’information (ex.: médias traditionnels versus réseaux sociaux), qui, à leur tour, influenceraient les niveaux de croyances complotistes.

On observe une répartition similaire pour les différentes strates de revenus : chez ceux et celles ayant des revenus ménagers de plus de 100 000 $, 5 % affichent une mentalité complotiste (contre 20 % chez les ménages gagnant moins de 30 000 $). Les personnes moins nanties pourraient être plus méfiantes à l’égard des institutions publiques et des gouvernements, se trouvant peu touchées par les engagements politiques des grandes institutions en matière de réduction des inégalités sociales.

Enfin, 28 % des personnes qui n’avaient pas d’emploi au début de la pandémie manifestaient des idées complotistes. Cette proportion baisse à 15 % chez les personnes retraitées et 6 % chez les personnes qui avaient déjà un emploi au début de la pandémie. Les mêmes mécanismes présentés plus hauts chez les personnes aux revenus faibles ou modestes pourraient ainsi être à l’œuvre.

Attitudes à l’égard de la vaccination et de la politique

D’autres variables, plutôt liées aux attitudes et aux croyances, révèlent des tendances intéressantes. En janvier 2021, l’intention vaccinale était fortement associée à la mentalité complotiste : 47 % des personnes qui n’avaient pas l’intention de se faire vacciner contre la COVID-19 ou ne pas savoir si elles allaient le faire affichaient un niveau élevé de croyances complotistes, contre seulement 6 % des personnes voulant recevoir le vaccin. Ces résultats rejoignent ceux obtenus dans d’autres études. Même si notre questionnaire sur les croyances complotistes ne sondait pas spécifiquement les complots liés à la vaccination, la forte différence observée suggère que les croyances complotistes font partie, chez l’individu, d’un système de croyances plus large, caractérisé par la méfiance envers les groupes considérés comme puissants ou élitistes, comme les autorités sanitaires.

Une autre trouvaille intéressante concerne le positionnement politique sur l’axe gauche-droite. Plus les personnes se placent vers la droite de l’échiquier politique, plus elles rapportent une mentalité complotiste (i.e., 41 % des personnes se positionnant à droite ont tendance à adopter une vision du monde complotiste, contre 12 % des personnes au centre, et 8 % à gauche). Selon certains auteur.es, l’idéologie politique des sources consultées pour s’informer sur la COVID-19 influencerait le niveau d’adhésion aux théories du complot. Avant même la pandémie, d’autres chercheur.es avançaient que c’est la saveur idéologique d’une théorie qui détermine sa propension à être adoptée selon qu’on se considère de droite ou de gauche.

Une fracture rurale-urbaine?

Un dernier aspect intéressant de nos participant.e.s est leur distribution géographique à l’échelle du Canada. Dans les zones rurales, les villes de petite taille et les villes de taille moyenne, on observe respectivement 15 %, 18 % et 24 % de personnes avec une mentalité complotiste, contre 11 % pour les grandes villes. En lien avec le positionnement politique, cette différence pourrait s’expliquer par la distribution inégale des partisans de la droite et de la gauche entre les régions rurales et urbaines. Dans notre échantillon, on remarque d’ailleurs que les régions rurales abritent deux fois plus de partisans de la droite (21 %) que les grands centres métropolitains (10 %).

Conclusion  

Dans ce premier billet de blogue sur les théories du complot en temps de pandémie, nous avons brossé un bref portrait des personnes à fortes croyances complotistes dans notre échantillon. Les revenus ménagers, le niveau de scolarité, le statut d’emploi, l’hésitation vaccinale, les idées politiques, et le fait d’habiter en région rurale semblent associés aux croyances complotistes. Ces mêmes facteurs sont aussi connus pour avoir un impact sur le bien-être psychologique qui est l’objet d’intérêt principal de l’étude COHESION. Dans le deuxième billet de blog sur le sujet, nous présenterons les résultats de l’analyse liant les croyances complotistes au bien-être en tenant compte de tous ces éléments. Restez à l’affût pour la suite !

Références

Abedi, V., Olulana, O., Avula, V., Chaudhary, D., Khan, A., Shahjouei, S., Li, J., & Zand, R. (2020). Racial, Economic, and Health Inequality and COVID-19 Infection in the United States. Journal of Racial and Ethnic Health Disparities. https://doi.org/10.1007/s40615-020-00833-4

Bertin, P., Nera, K., & Delouvée, S. (2020). Conspiracy beliefs, rejection of vaccination, and support for hydroxychloroquine : A conceptual replication-extension in the COVID-19 pandemic context. Frontiers in Psychology, 11(565128). https://doi.org/10.3389/fpsyg.2020.565128

Romer, D., & Jamieson, K. H. (2020). Conspiracy theories as barriers to controlling the spread of COVID-19 in the U.S. Social Science & Medicine, 263, 113356. https://doi.org/10.1016/j.socscimed.2020.113356

Miller, J. M., Saunders, K. L., & Farhart, C. E. (2016). Conspiracy Endorsement as Motivated Reasoning : The Moderating Roles of Political Knowledge and Trust. American Journal of Political Science, 60(4), 824‑844. https://doi.org/10.1111/ajps.12234

Blank, J. M., & Shaw, D. (2015). Does Partisanship Shape Attitudes toward Science and Public Policy? The Case for Ideology and Religion. The ANNALS of the American Academy of Political and Social Science, 658(1), 18‑35. https://doi.org/10.1177/0002716214554756

Rédigé par Alexandre Coderre et le comité éditorial de l'équipe COHESION.

Sondage d’opinion COHESION: La voix de nos participants

​​Maintenant que nous avons vu pourquoi la participation citoyenne est importante pour la recherche en santé publique, voici comment l’étude COHESION a commencé à engager ses participants ! La participation citoyenne se fait sur un continuum allant de l’information, à la consultation, à la collaboration ou l’autonomisation. Dans un premier temps, nous avons créé un sondage d’opinion en décembre 2020, afin de consulter nos participants et obtenir un retour sur leurs expériences de l’étude. Le sondage comprenait des questions à choix multiples et des questions ouvertes afin que les répondants puissent développer leurs réponses. Les répondants pouvaient suggérer des moyens d’améliorer leur expérience, des sujets pour les futurs questionnaires et leurs réflexions sur différents aspects de l’étude COHESION.

À notre grande surprise, plus de 350 participants ont répondu à ce sondage ! Pour vous faire part de certains de nos résultats, voici quelques conclusions intéressantes de ce sondage d’opinion !

Pourquoi participez-vous à l’étude COHESION ?

73 % des répondants indiquent qu’ils participent pour l’importance de la problématique, suivi par la curiosité ou l’altruisme. D’autres citent des réponses comme le fait d’aimer les sondages, de vouloir aider à étudier les impacts de la pandémie, ou encore par intérêt pour la recherche.

💡 Pourquoi est-ce important?

En sachant pourquoi les gens participent, nous pouvons mieux comprendre comment présenter l’étude et motiver d’autres à y participer !

Avez-vous rencontré des problèmes et des doutes en remplissant les questionnaires ?

La majorité des répondants n’ont pas rencontré de problèmes ou de doutes en remplissant les questionnaires passés. Sur les 25 % qui en ont rencontré, seuls 5 % ont contacté la coordinatrice du projet. Les principales raisons pour ne pas avoir contacté la coordinatrice sont que le problème s’est résolu de lui-même ou que le problème n’en valait pas la peine, qu’ils manquaient de temps ou qu’ils ne disposaient pas des informations nécessaires.

💡 Pourquoi est-ce important?

Savoir comment les participants utilisent la plateforme nous permet de réaliser des ajustements qui peuvent rendre leur expérience plus facile. Il est également important de noter que si les participants rencontrent des problèmes, la coordinatrice du projet devrait être disponible pour les aider. Comme seulement 5 % des personnes ayant rencontré des problèmes ont contacté la coordinatrice, des mesures peuvent être prises pour s’assurer que les informations sont claires et facilement accessibles.

Comment jugez-vous la convivialité et la structure de l’étude ?

Les répondants devaient évaluer une série d’affirmations sur la convivialité de la plateforme COHESION sur une échelle allant de « pas du tout d’accord » à « tout à fait d’accord ». Parmi ces affirmations figuraient : « La plateforme utilisée pour les enquêtes est conviviale », « Les enquêtes sont présentées de manière organisée », « Il est facile de répondre aux questions des enquêtes », « Les questions des enquêtes sont trop longues », etc.

Les commentaires populaires sont que la longueur des enquêtes pourrait être réduite, que les questions pourraient être formatées différemment (par exemple, inclure des exemples de réponses ou permettre une option « sans réponse »), et que plus de questions devraient être ouvertes où permettre d’élaborer certaines réponses. De nombreux commentaires ont également été faits sur la section VERITAS du questionnaire, la section qui demande aux participants d’identifier les lieux visités ainsi que les contacts sociaux. Les commentaires sur VERITAS soulignent la difficulté de se souvenir des lieux visités dans le passé, la difficulté de modifier ou de supprimer des lieux visités, et la confusion sur ce qui définit un lieu visité.

💡 Pourquoi est-ce important?

Malgré l’accord général concernant la simplicité d’utilisation de la plateforme et des questionnaires, des efforts pour simplifier et raccourcir nos questionnaires et la section VERITAS sont en cours. Comprendre comment les gens utilisent VERITAS nous permet également de considérer les biais possibles lors de l’analyse des réponses, comme le biais de mémoire.

Quels thèmes sont les plus appréciés ?

Nous avons également demandé aux répondants d’indiquer leur appréciation des thèmes abordés dans l’étude, de « fortement détesté » à « fortement apprécié ». Les thèmes « Activités quotidiennes », « Inquiétudes concernant la pandémie de COVID-19 », « Santé », « Sommeil » et « Vaccins » ont été bien appréciés. Les thèmes « Consommation de substances », « Difficultés de l’enfant », « Retour à l’école », « Lieux visités » et « Sécurité alimentaire » ont reçu des réponses plus neutres ou négatives.

Dans cette section, les répondants ont également suggéré des thèmes pour les futurs questionnaires. Quelques suggestions incluent :

💡 Pourquoi est-ce important?

En connaissant les thèmes que nos participants aiment ou n’aiment pas, nous nous assurons que les questions que nous posons sont pertinentes pour nos participants et nous pouvons ainsi planifier les futurs questionnaires.

Cela nous permet également d’adapter nos questionnaires si certains thèmes sont trop spécifiques. Par exemple, les thèmes les moins appréciés sont aussi ceux qui font référence à des situations spécifiques qui ne s’appliquent pas à tous, comme le fait d’être parent, d’aller à l’école, de consommer des substances, etc. Finalement, les suggestions de thèmes nous aident à savoir ce qui suscite la curiosité des gens, ainsi que certaines des inquiétudes et des situations que la pandémie a pu créer.

Les répondants téléchargent-ils l’application ETHICA ?

Les participants ont également la possibilité de télécharger une application pour téléphone intelligent, ETHICA, pour compléter les données des questionnaires. L’application complète l’étude avec des données GPS, de sommeil, de santé mentale et de contacts sociaux collectés régulièrement. Au moment de cette enquête, 41 % des répondants avaient téléchargé l’application. Les principales raisons pour lesquelles certains participants ne téléchargent pas l’application incluent : qu’ils ne possèdent pas de téléphone intelligent, qu’ils ne pensent pas que cela soit nécessaire, qu’ils n’ont pas l’espace nécessaire dans leur téléphone ou qu’ils jugent avoir des enjeux de vie privée et de confidentialité. Les commentaires sur ETHICA portent notamment sur les pauses fréquentes de l’application et l’horaire des sondages qui apparaissent à des moments inopportuns (ex. : trop tôt le matin).

💡 Pourquoi est-ce important?

Le fait de savoir pourquoi les participants téléchargent ou non ETHICA peut nous donner un aperçu de la manière de présenter cette application comme un complément à l’étude COHESION ainsi que la manière dont ces données seront utilisées.

Les répondants aimeraient-ils nous donner plus de rétroaction ?

Pour terminer, 38 % des répondants à l’enquête d’opinion souhaitent continuer à aider l’équipe à améliorer l’étude. La majorité d’entre eux aimeraient continuer à fournir des commentaires par le biais de sondages, mais beaucoup sont également intéressés par la participation à des réunions en petits groupes.

💡 Pourquoi est-ce important?

Compte tenu de cet intérêt pour une plus grande implication, nous nous sommes associés au Centre d’excellence sur le partenariat avec les patients et le public (CEPPP) pour développer une stratégie de participation. En plus d’autres sondages d’opinion, nous prévoyons créer des groupes de travail avec les participants COHESION qui souhaitent aider l’équipe.

Comment l’étude Cohésion peut-elle améliorer votre expérience ?

Enfin, nous avons demandé à nos participants ce que l’équipe pouvait faire pour améliorer leur expérience. Nos participants ont déclaré qu’ils aimeraient que l’équipe communique avec eux plus régulièrement que nous partagions les résultats et nos progrès plus fréquemment, et savoir comment leur participation est utile à l’étude. Nous sommes d’accord !

💡 Pourquoi est-ce important?

À partir de cet automne, COHESION lancera des infolettres régulières qui présenteront les premiers résultats, les nouvelles des chercheurs et tout ce qui concerne COHESION ! En attendant, n’oubliez pas de suivre COHESION sur les médias sociaux !

Quelle est la suite ? Au cours des derniers mois, nous avons pris à cœur les commentaires de nos participants. Des changements considérables ont été apportés pour rendre nos questionnaires plus simples et plus accessibles. Vos commentaires nous ont permis d’améliorer l’étude, de régler certains problèmes et de la rendre plus pertinente et plus agréable pour nos participants actuels et futurs. Mais ce ne sont que quelques-uns des changements que nous avons apportés... nous ne voulons pas vous gâcher la surprise ! Restez à l’écoute pour d’autres nouvelles à venir cet automne !

Rédigé par Alexie Kim et le Comité éditoriale de l'étude COHESION, conçu par l'agence IMPAKT Scientifik.

La résilience communautaire, la COVID-19 et la santé mentale

Comment se sortir collectivement d’une crise sanitaire comme la pandémie de COVID-19 sans creuser les inégalités ? Comment mieux se préparer aux futures catastrophes ? La résilience de la communauté pourrait peut-être bien faire partie de la réponse.

La pandémie a eu des répercussions sur toutes les sphères de la vie de l’individu, de la communauté et de la société, malgré l’assouplissement des mesures sanitaires des dernières semaines. Des effets à long-terme sur la santé mentale sont attendus avec une inquiétude particulière pour les groupes déjà fragilisés par les inégalités et touchés de manière disproportionnée par la pandémie et les mesures sanitaires mises en place, tels que les femmes, les personnes marginalisées ou en situation d’itinérance, les personnes racisées ou issues de l’immigration ainsi que les enfants et adolescents.

Cependant, un peu partout au pays (et dans le monde!), des initiatives citoyennes, virtuelles ou non, ont vu le jour pour offrir soutien et solidarité. On pense, notamment au début de la crise, aux arcs-en-ciel aux fenêtres et du mot-clic #çavabienaller, pour symboliser la résilience - après la pluie le beau temps. Ou bien, aux lignes d'appel et aux groupes Facebook créés pour s’entraider entre voisins ainsi qu’aux initiatives d’achat local pour soutenir les commerces de proximité durement touchés. Le contexte de la pandémie nous a poussés à tisser des liens forts au sein de nos communautés afin d’être résilients, ensemble, et faire face aux inégalités de santé.

Qu’entend-on par résilience communautaire?

La résilience communautaire peut être définie comme « la capacité des membres d’une communauté de s’adapter à un environnement caractérisé par le changement, l’incertitude, l’imprévisibilité et la surprise en mobilisant les ressources communautaires [1]. »

Magis (2010)

La résilience communautaire va donc au-delà de l’adaptation en incluant aussi le potentiel pour une communauté de profiter des perturbations pour se réinventer, changer de trajectoire, ou développer des pratiques durables à long-terme. Parmi les facteurs collectifs contribuant à la résilience communautaire, la littérature scientifique autour des changements climatiques souligne l’importance des concepts suivants:

  • Sentiment d’appartenance au quartier
  • Attachement au lieu
  • Participation citoyenne
  • Leadership local
  • Confiance
  • Cohésion sociale

En mars dernier, l’étude pan-canadienne COHESION a envoyé une série de questions aux participants pour documenter la distribution sociale et spatiale de ces facteurs collectifs de résilience et évaluer leur relation avec les niveaux de santé mentale et de bien-être. Les premières analyses montrent un gradient social au niveau des facteurs de résilience communautaire, ces derniers corrélant avec certains indicateurs de santé mentale, tels que le niveau d’anxiété, de dépression et de solitude.

Sentiment d’appartenance au quartier

Le sentiment d’appartenance au quartier, un facteur contribuant à la résilience communautaire, correspond à la perception d’un individu d’être intégré dans sa communauté [2, 3]. Les membres d’une communauté résiliente ont un fort sentiment d’appartenance, ce qui augmente leur implication dans l’amélioration de leur communauté et contribue à une santé mentale positive.

Dans l’étude COHESION, un intérêt particulier a été porté à trois indicateurs de santé mentale : la solitude, l’anxiété et la dépression.

La figure ci-dessous montre que les participants ayant déclaré un sentiment d’appartenance Très fort ou Assez fort présentent des scores plus faibles de solitude, d’anxiété et de dépression. Nous avons aussi pu constater que les participants avec un faible sentiment d’appartenance et un faible revenu avaient de plus hauts scores de solitude, d’anxiété et de dépression.

Figure 1 : Sentiment d'appartenance en relation avec la solitude, l'anxiété et la dépression

Figure 2: Sentiment d'appartenance en relation avec la solitude, l'anxiété et la dépression selon le revenu

Que peut-on en conclure ?

Ces liens entre sentiment d’appartenance au quartier et indicateurs de santé mentale soulignent le rôle que peuvent jouer nos environnements de vie dans nos capacités individuelle et collective à faire face à l’adversité. Il est important de mieux comprendre quelles caractéristiques de nos quartiers contribuent au sentiment d’appartenance, à la résilience communautaire, et à l’amélioration de la santé mentale et du bien-être. Pendant les périodes les plus restrictives de la pandémie, certaines ressources locales comme les parcs ou les commerces de proximité ont pu jouer un rôle essentiel, offrant des opportunités de s’activer en prenant un bol d’air frais, ou de maintenir certains contacts sociaux. En créant des quartiers propices aux interactions, offrant une bonne accessibilité aux services et infrastructures, et des opportunités pour toutes les populations, la résilience communautaire est renforcée, et la santé mentale et le bien-être des populations est favorisée. Investir dans nos quartiers, les transformer et les mobiliser est essentiel pour aider à relever les grands défis, qu'il s'agisse de la crise sanitaire, de l'adaptation au changement climatique ou de la participation démocratique de tous et toutes.

Rédigé par Salma Sahil et le comité éditorial de l’étude COHÉSION

Références

  1. Magis, K. (2010). Community Resilience: An Indicator of Social Sustainability. Society & Natural Resources, 23(5), 401-416.
  2. Kitchen, P., Williams, A. M., & Gallina, M. (2015). Sense of belonging to local community in small-to-medium sized Canadian urban areas: a comparison of immigrant and Canadian-born residents. BMC Psychology, 3(1), 28.
  3. Hagerty, B. M. K., Lynch-Sauer, J., Patusky, K. L., Bouwsema, M., & Collier, P. (1992). Sense of belonging: A vital mental health concept. Archives of Psychiatric Nursing, 6(3), 172-177.

Sommeil: Sommes-nous tous logés à la même enseigne?

Pour comprendre comment la situation de logement est liée à la santé du sommeil durant la pandémie de COVID-19, l’étude COHESION a exploré si le fait d’être locataire ou propriétaire et la satisfaction concernant les conditions de logement étaient associés à la durée du sommeil. En effet, les résultats révèlent que les locataires ont deux fois plus de chance de dormir moins de sept heures par nuit que les propriétaires.

Pour en savoir plus, consultez notre blog sur Dormez Là-Dessus!

Vous pouvez aussi consulter notre article sur La Presse ou bien écouter notre balado sur Ici Radio Canada.

5 raisons d'encourager la participation citoyenne en recherche en santé

La pandémie de la Covid-19 a été une période unique qui a sensibilisé et intéressé le public à la santé publique et ses activités. L’implication du public dans les instances de prise de décision et le développement de mesures sanitaires a pourtant été limitée. Dans le contexte de la recherche, plusieurs milieux, incluant les hôpitaux, les centres de recherche et les organismes communautaires, cherchent aujourd’hui à pousser le rôle passif du citoyen - qui se fait recruter pour participer à une étude - vers un rôle actif dans le processus même de la recherche, c’est-à-dire impliqué dans sa planification, son implantation et son évaluation.

Qu’est-ce que la participation citoyenne en recherche?

Avez-vous déjà reçu des soins ou interagi avec un professionnel de la santé qui ne comprenait pas les réalités de votre quotidien? Avez-vous déjà participé à une étude où les questions n’étaient pas pertinentes pour vous? Avez-vous déjà eu l'impression d'être mal représenté par un projet ou une intervention?

La participation citoyenne se produit lorsque les citoyens "collaborent de manière significative et active à la gouvernance, à l’établissement des priorités et à la conduite de la recherche, ainsi qu’à la synthèse, à la distribution, au partage et à l’application des connaissances qui en résultent 

Centre d’excellence pour le partenariat avec les patients et le public (CEPPP)(CEPPP)

En d’autres mots, la participation citoyenne intègre des citoyens dans le processus de la recherche et tient compte de leurs connaissances, de leurs préférences et de leurs perspectives tout au long d’un projet. Leur participation peut être requise dans diverses sphères du projet avec différents niveaux d’implication, où ils peuvent agir comme consultants, comme collaborateurs, voire comme partenaires.

Voici cinq raisons d’encourager la participation du public à la recherche en santé.

1) La participation citoyenne développe le sentiment de communauté

La participation citoyenne est une occasion de renforcer vos relations avec les groupes et les communautés que vous souhaitez servir. La participation citoyenne peut également améliorer la confiance des participants envers les chercheurs et renforcer leur sentiment d’appartenance à votre étude.

2) La participation citoyenne peut mettre en évidence des angles morts

La participation citoyenne valorise les connaissances uniques acquises par chacun durant son parcours de vie, au même titre que les savoirs académiques. Ces connaissances peuvent être propres à la santé, comme le fait d’avoir des problèmes de santé, d’avoir reçu un traitement, ou de vivre avec des facteurs de risque, mais elles peuvent aussi être plus générales, comme le fait de vivre dans une certaine région, le fait d’être parent, de vivre dans une situation précaire ou d’être une personne racisée. Ce concept reconnaît que chaque individu est expert de sa santé, de sa maladie, de sa situation sociale. En consultant le public, les chercheurs et professionnels de la santé sont sensibilisés à des connaissances et expériences qu’ils ne partagent pas avec leur public d'intérêt. Ceci permet d’identifier des angles morts dans un projet.

3) La participation citoyenne augmente la pertinence et l’utilité de la recherche

En ouvrant la science et la recherche au public, la participation citoyenne élimine certaines des barrières entre chercheurs et public. L’implication de citoyens dans différentes étapes de la recherche contribue à garantir qu’une étude est conçue en tenant compte des groupes concernés, que ses objectifs se traduisent par des actions appropriées, et que les résultats attendus mènent à l’amélioration des soins de santé, des politiques publiques et ultimement à l’amélioration de la santé et du bien-être. L’objectif ultime est de développer des projets et des interventions qui évoluent avec, pour et par la population.

4) La participation citoyenne favorise le renforcement des capacités

La participation citoyenne permet aux personnes impliquées de développer de nouvelles compétences et aptitudes. Les équipes qui intègrent des citoyens dans leurs projets leur fournissent les outils et l’accompagnement nécessaires pour encourager l’autonomisation ou « l’empowerment ». Outre l’autonomisation, les citoyens qui collaborent avec les équipes de recherche développent leur confiance en soi et leur curiosité ainsi que des capacités telles que l’écoute active et la prise de parole.

5) La participation citoyenne renforce plusieurs valeurs de la santé publique

La santé publique s'appuie sur plusieurs valeurs fondamentales telles que la transparence, l’ouverture, l’autonomie et la responsabilisation, la collaboration et la réciprocité. Ces valeurs, au centre de la promotion de la santé, encouragent des processus favorables à l’amélioration de la santé et à la qualité de la recherche. Par exemple, en mettant en pratique l’ouverture et la collaboration - des valeurs contribuant à la confiance du public envers les institutions, la participation citoyenne augmente la pertinence et l’utilité de la recherche dans le but d’améliorer la santé et le bien-être (en lien avec la raison #3!).

La participation citoyenne et l’inclusion des savoirs expérientiels sont des occasions d’améliorer la recherche, d’informer ses processus, et d’encourager l’implication de toutes et tous. L'étude COHESION COHESION study développe actuellement des activités de participation citoyenne, et un premier sondage a été réalisé en décembre 2020 afin de mieux comprendre l’expérience des participants. Restez à l'affût des blogues pour les résultats de ce sondage et les activités de participation citoyenne de COHÉSION à venir!

Rédigé par Alexie Kim et le comité éditorial de l’étude COHÉSION